Jamais un président de la République n’aura réussi pareil coup marketing : résumer sa politique (et son échec) en un unique nombre. Le hollandisme ? 75 %. Le redressement du pays ? 75 %. La France pour le reste du monde ? 75 %. Cette « contribution exceptionnelle de solidarité » condense à elle seule les errements du pouvoir. « Le triomphe du démagogue est passager, mais les ruines sont éternelles », assurait Charles Péguy. Pour l’euphorie de la victoire, c’est peu dire qu’elle a été éphémère. Et si la taxe sur les hauts revenus a pu être présentée comme le tournant de la bataille pour l’Elysée, elle s’est vite transformée en boulet du quinquennat. Pour les ruines… On n’a pas fini de mesurer les dégâts de cet impôt
absurde. Economiques, bien sûr. Nul doute qu’il contribuera à accélérer l’exil des hauts cadres. Nul doute qu’il envoie un signal catastrophique aux investisseurs étrangers soucieux de compétitivité. Nul doute qu’il sacrifie l’essentiel – une réflexion sur la réforme fiscale – à l’accessoire (une manœuvre politicienne). Et puis il y a les ravages politiques. A l’origine, la mesure visait ni plus ni moins à « faire payer les riches ». Que 1 500 salaires très élevés participent à l’effort collectif de redressement, pourquoi pas ? Mais autre chose est de laisser accroire qu’en conséquence, les classes moyennes seraient épargnées ou presque. Le raz de marée fiscal a balayé cette supercherie. Ses effets électoraux s’annoncent dévastateurs. Quant au lobbying des clubs de foot, il alimente le récit d’un Président sensible à toutes les pressions, prêt à toutes les reculades. Un Président sans autorité en passe de devenir Monsieur 75 %... d’impopularité.
Rémi Godeau