On savait, pour le constater tous les jours, que nous avions en France une des gauches les plus maladroites du monde, en tout cas la plus impopulaire de ce dernier demi-siècle. On avait oublié que nous pouvions aussi avoir la droite la plus bête du monde. Le départ en vrille autour de  « l’affaire Ecomouv’ » nous le rappelle justement. Voilà l’ancienne majorité tétanisée par les questions légitimes qui se posent autour du dispositif mis en place pour percevoir et gérer l’écotaxe. La voici prête à s'entre-déchirer, à renier ce qu’elle a initié, à
désavouer sa signature et à lancer une enquête, instillant le soupçon sur cette affaire au lieu d’en défendre le principe : quoi, une société privée pour collecter des taxes ? Comment, un consortium se rémunérant sur des services rendus, factures à l’appui ? Et avec des étrangers au capital de l’entreprise, qui plus est ? Ainsi l’Etat ne contrôlerait pas tout ? C’est donc qu’il y a un loup.
Outre que cette fuite quasi-généralisée n’est pas très glorieuse, elle présente le grave inconvénient de diaboliser un des rares moyens qu’il reste aux Etats en faillite de ne pas être paralysés. Car démolir le système Ecomouv’, c’est condamner les partenariats public-privé et renoncer à tout moyen d’action pour la future et indispensable réforme de l’Etat. Comment faire comprendre à nos hommes politiques, ceux qui sont au pouvoir et ceux qui aspirent à l’exercer, que l’Etat n’a plus d’argent, qu’il doit en dépenser moins, encore et toujours moins, et que cette pénurie de moyens exige de nouer des partenariats avec le privé, de confier à d’autres qu’à la puissance publique une partie des tâches non-régaliennes de l’Etat ? Par sa réaction apeurée et irréfléchie, la droite vient de renforcer le côté intouchable d’un Etat rêvé omnipotent et réellement impotent. Comment dit-on « se tirer une balle dans le pied » en breton ?
Nicolas Beytout