La scène du drame se met en place en Centrafrique. La polarisation s’accentue entre chrétiens et musulmans. Le désarmement des combattants piétine. Les tensions communautaires sont à vif. Pire, les événements des derniers jours tendent à montrer que le dispositif français Sangaris, fort de 1600 hommes, pourrait bien avoir pour effet, involontairement, d’attiser les tensions au lieu de les calmer. On a vu ainsi des musulmans défiler dimanche pour accuser les soldats français de partialité. A l’inverse, on a entendu hier plusieurs milliers de chrétiens proclamer : « Oui à la France, non à la Séléka». Manifestants réprimés par des soldats tchadiens membres de la mission militaire africaine (Misca), celle-là même que le contingent français est censé soutenir.
Les meilleures intentions du monde peuvent parfois conduire droit en enfer. La France
poursuivait des buts nobles en s’interposant en Centrafrique pour faire cesser les atrocités sectaires. Mais ses renseignements étaient insuffisants, son analyse de la situation défaillante et ses buts de guerre, inexistants. Il ne suffit pas d’envoyer des militaires pour rétablir la paix. Encore faut-il leur dire contre qui ils se battent et quelle est leur mission. En milieu urbain, contre des miliciens armés de machettes, des pillards désorganisés et des populations surexcitées, il n’y a pas grand-chose qu’une armée régulière puisse faire, dès lors que sa seule force de dissuasion est battue en brèche par les belligérants. Des hommes de bonne volonté, parmi lesquels l’archevêque de Bangui et l’imam de la capitale, tentent de s’interposer. Faute de quoi les militaires français risquent bien de se retrouver au beau milieu d’un choc de civilisations. Pris en tenailles.