Jusqu’où ira Arnaud Montebourg ? Un jour, le ministre du Redressement productif attaque les « talibans du droit » de Bruxelles, accusés d’étouffer l’industrie. Un autre, il crée un champion public des mines pour asseoir la souveraineté étatique sur des ressources qu’il ne faut pas laisser aux « mains dangereuses de multinationales ». Plus tard, il propose d’ouvrir « une bataille politique » contre l’euro fort. Et encore, jeudi, il menace d’un « bon coup de pied aux fesses » la grande distribution, soupçonnée de crime de lèse-made in France.
Au flou présidentiel le soldat Montebourg a au moins le mérite d’opposer une doctrine claire. Aberrante, courte, démagogue, mortifère, mais claire. L’héritier par usurpation de Colbert
défend moins l’Etat que l’étatisme. Comme si, ipso facto, la puissance publique avait raison contre la société civile, contre l’initiative privée, contre le marché. Comme si le dirigisme exacerbé, l’interventionnisme systématique et – bientôt ? – l’autoritarisme décomplexé valaient mieux pour sortir de la crise que de créer les conditions d’un retour de la confiance.
Certes, le ministre est dans son rôle politique lorsqu’il parle au « peuple », désormais moins « de gauche » que « frontiste ». Faut-il pour autant emprunter des accents populo-nationalistes en vantant des « actes de préférence » ? Et puis la pensée montebourguienne, aussi aboutie fut-elle, ne saurait résumer la position du gouvernement. Mais pourquoi dès lors laisser le héraut de l’anti-mondialisation monopoliser le champ médiatique ? Ce discours tonitruant cache une autre vérité, sur fond de chômage et de dette records : plus le pays s’étatise et moins il est gouverné.
Rémi Godeau