Dans l’atmosphère glauque qui nimbe désormais la scène politique, la moindre note d’humour devient une bouffée d’air rafraichissante. C’est Najat Vallaud-Belkacem qui, au sortir du Conseil des ministres, a redonné le sourire à quiconque observe avec perplexité ou effarement l’enchaînement des affaires. La justice, a ainsi expliqué la ministre porte-parole du gouvernement, doit poursuivre son travail en toute indépendance, dans le respect des principes qui guident son action : et de citer la séparation des pouvoirs, la présomption d’innocence, le secret de l’instruction et les droits de la défense.
Quelle hypocrisie ! Car bien entendu, la justice est un univers politisé dans lequel certaines nominations sont politiques, dans lequel certains juges – pas tous, bien sûr – ont une vision
politique de leur métier, parfois une pratique orientée de leur mission en fonction du contentieux qu’ils pourraient avoir avec tel représentant du pouvoir. Quelle tartufferie, car bien entendu, le secret de l’instruction est bafoué, piétiné, utilisé comme arme de combat rapproché. Quant à la présomption d’innocence, quelle blague ! Elle est en lambeaux, au pied de l’autel de la vox populi où elle voisine avec les droits de la défense et autres libertés publiques que l’on abîme tous les jours au nom de la transparence.
Dire cela, ce n’est pas exonérer Nicolas Sarkozy : s’il a commis des fautes, la justice est là pour en juger. Dire cela, ce n’est pas non plus accabler tous les juges, disqualifier l’institution dans son ensemble. C’est, en revanche, s’inquiéter de voir que le principe de justice est désormais remplacé par le principe de soupçon. Une dérive grave pour la démocratie.
Nicolas Beytout