Dans le procès en amateurisme que les Français, à juste titre, faisaient à Jean-Marc Ayrault, figurait en bonne place son incapacité à empêcher les couacs de ses ministres. A l’inverse, parmi les qualités évidentes qu’avait montrées Manuel Valls dès son arrivée à Matignon se trouvaient l’autorité et la capacité à diriger un gouvernement parlant d’une même voix.
Les propos invraisemblables de Ségolène Royal portent un coup sévère à cette méticuleuse construction d’image. Agression caractérisée contre Arnaud Montebourg et sa croisade sur Alstom, suspicion aggravée contre Michel Sapin et son ministère des Finances, provocation délibérée envers les écolos et une partie des députés socialistes obsédés d’écotaxe, le tout agrémenté d’un superbe contentement de soi qui ravale toute cette piétaille
gouvernementale au rang de minuscules politicards machistes : jamais depuis le début du quinquennat la foisonnante chronique des couacs ne s’était enrichie d’aussi grandes pages.
Manuel Valls sait donc à quoi s’en tenir : non seulement le lien direct de Ségolène Royal avec les Français lui donne, pense-t-elle, tous les droits, mais en outre, son lien ancien avec François Hollande la rend intouchable. Déjà incontrôlable, la voici donc inamovible : une rupture avec elle se transformerait immanquablement en un nouvel épisode du vaudeville politico-familial humiliant que le chef de l’Etat a déjà abondamment alimenté. Après l’avertissement du vote des 41 parlementaires hostiles à la trajectoire des finances publiques, une autre faille s’ouvre dans le dispositif du Premier ministre. La dégradation est certainement plus rapide qu’il ne l’avait rêvé.
Nicolas Beytout
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